Infections de la Main (Panaris, phlegmon)


Dr Franck Atlan

Les infections de la main sont extrêmement courantes et souvent prises en charge de manière inadaptée, soit par négligence devant un aspect apparemment peu inquiétant, soit par l’instauration d’un traitement inadéquat. Elles sont toujours à prendre au sérieux car le contrôle de l’infection peut nécessiter un geste chirurgical agressif et même parfois plusieurs interventions.

 PANARIS

Qu’est ce que c’est? (définition)

Il s’agit d’une infection généralement localisée autour de l’ongle, parfois consécutive à une manipulation de la peau ou après s’être rongé les ongles. Le panaris évolue en 2 étapes :

  1. Stade inflammatoire :

La peau est rouge et gonflée, mais la douleur est sourde et continue, et ne réveille pas la nuit.

Le traitement repose sur les bains d’antiseptiques locaux plusieurs fois par jour. Les antibiotiques en comprimé ou en pommade sont à éviter absolument, car ils ne guérissent pas l’infection mais sélectionne au contraire les germes les plus résistants. Une consultation de contrôle est indispensable 48 heures après le début du traitement pour en évaluer l’évolution.

2. Stade collecté :

La douleur est “pulsatile” : le patient sent son cœur battre dans le doigt, et “insomniante” : elle réveille la nuit. La peau est rouge et gonflée et l’on peut voir une zone blanchâtre témoignant de l’existence d’une poche (“collection”) de pus.

Une opération est toujours nécessaire : elle consiste à retirer (“exciser”) tous les tissus infectés, et à laisser cicatriser la zone exposée, à l’aide de pansements cicatrisants. Un traitement antibiotique est souvent prescrit en complément du geste chirurgical.

 PHLEGMON

Qu’est ce que c’est? (Définition) :

Il s’agit d’une infection étendue à tout le doigt, jusqu’à la paume de la main voire jusqu’au poignet. Le phlegmon fait généralement suite à une plaie négligée (piqûre, coupure, morsure, etc.), lors de laquelle la gaine des tendons fléchisseurs a été ouverte et contaminée par des bactéries. Cette gaine constitue un espace propice à la prolifération des bactéries, et peut se remplir de pus. Dans les cas extrêmes, les tendons fléchisseurs peuvent être définitivement détruits par l’infection.

Il s’agit toujours d’une infection grave, qui doit être prise en charge en urgence sous peine de devenir incontrôlable et de causer des dégâts irréversibles.

Comment faire le diagnostic ?

A l’examen, le doigt est gonflé et sa mobilisation est très douloureuse. La palpation de la base du doigt déclenche également de fortes douleurs. La présence de fièvre constitue un signe de gravité.

Aucun examen complémentaire n’est nécessaire au diagnostic, mais une prise de sang peut rechercher des signes d’infection. Une radiographie permet de rechercher un corps étranger et d’évaluer l’atteinte osseuse éventuelle.

Quelles sont les complications immédiates ?

L’absence de prise en charge précoce et adaptée peut entrainer une perte de contrôle de l’infection, pouvant avoir des conséquences dramatiques compromettant la survie du doigt, voire du patient.

Quel est le traitement ?

La gravité potentielle de l’infection et le risque d’extension impose une chirurgie précoce et souvent agressive. L’opération commence par le nettoyage de la porte d’entrée infectieuse, et l’exploration afin de s’assurer que les éléments  nobles (nerfs, artères, tendons) sont intacts. On visualise directement la gaine des fléchisseurs, que l’on peut trouver une ouverte et contenant du pus. De nombreux prélèvements sont réalisés pour examen bactériologique. L’évacuation du pus et le lavage de la gaine nécessitent de réaliser une autre ouverture au niveau de son “cul de sac” dans la paume ou au poignet, afin d’y introduire un fin conduit en plastique permettant un abondant lavage.

Dans les cas graves, les tendons sont noyés dans un tissu purulent (“synovite purulente”) impossible à évacuer par simple lavage. Il faut alors ouvrir complètement le doigt sur toute la longueur de la gaine, afin de pouvoir soigneusement retirer tous les tissus infectés. Dans les cas extrêmes, les tendons eux mêmes sont détruits par l’infection, et doivent être retirés.

Le doigt est ensuite largement désinfecté à l’aide de produits antiseptiques. En fin d’intervention, la peau est laissée largement ouverte afin d’éviter la récidive de l’infection. La cicatrisation nécessite donc la réfection de pansements réguliers pendant jours voire semaines.

Un traitement antibiotique est systématiquement prescrit en complément du geste chirurgical. Il peut être modifié en fonction des résultats des prélèvements bactériologiques.

Dans les infections sévères, et même si la première opération s’est correctement déroulée, il arrive que le contrôle de l’infection nécessite plusieurs interventions chirurgicales.

Quelles sont les suites ?

– Si tout se passe bien :

L’infection est résolue par l’association d’un geste chirurgical adapté et d’un traitement antibiotique efficace sur le germe responsable. La cicatrisation est obtenue en 2 à 3 semaines. La bonne récupération nécessite une rééducation bien suivie pendant plusieurs semaines, l’infection étant très enraidissante pour le doigt. Si les tendons ont du être sacrifiés pour traiter l’infection, une chirurgie de reconstruction peut être proposée plus tard, une fois l’infection guérie (technique de Hunter). La récupération complète n’est pas systématique.

– En cas de problème :

Le contrôle de l’infection peut nécessiter plusieurs opérations. Par la suite, en cas enraidissement résistant à la rééducation, et peut proposer une opération de libération des tendons voire des articulations (ténolyse voire téno-arthrolyse), afin de détruire les adhérences et de faciliter leur coulissement.

 Dr Franck Atlan